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Destin

Un matin, le roi vit accourir son jeune ministre qui se jeta à ses genoux, pâle et tremblant :

- Je t’en supplie, Seigneur, laisse-moi quitter la ville aujourd’hui même !

- Et pourquoi donc ? s'enquit le roi.


- Pardonne mon épouvante, Lumière des Croyants, mais ce matin, en traversant la place pour venir au palais, une femme m’a heurté dans la foule. Je me suis retourné et j’ai reconnu la mort. Elle me regardait fixement, Seigneur, elle me cherche...

- Es-tu sûr que c’était la mort ? s'enquit le souverain.

- Oui, Seigneur, elle était drapée de noir, d'une extrême maigreur, aux yeux vides et à la pâleur sépulcrale. Son regard était effrayant ! Elle s'est retournée sur mon passage et a tendu les bras vers moi. Crois-moi, Seigneur, elle me cherche ; laisse-moi partir à l’instant même, je prendrai mon coursier le plus rapide, et si je ne m’arrête pas, je peux être ce soir à Bénarès !

Le roi, qui aimait tendrement son ministre, le laissa partir. Ce dernier s'empressa de rejoindre les écuries, pris le meilleur coursier et disparut dans un nuage de poussière, vers la cité bénie.

Songeur, le roi sortit du palais déguisé, comme il avait souvent l’habitude de le faire. Sur la place du marché, il vit la mort et s’avança vers elle sans crainte :

- Mort, j’ai une question à te poser : mon ministre est un homme encore jeune et bien portant. Pourquoi l’as-tu terrorisé ce matin en le fixant d’un regard menaçant ?

- Ce n’était pas un regard menaçant mais un regard étonné, répondit le Spectre. Je n'ai pas voulu l'effrayer, ce n'était qu'un geste de surprise, car je l'ai vu en ville aujourd'hui alors que je l'attends pour le prendre ce soir à Bénarès.

destinée

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